Bonjour à tou·te·s et bienvenue dans ma chronique 🙂 Je suis Stéphanie, j’ai 42 ans et je suis infirmière. Je vis avec un diabète de type 1 depuis 27 ans, et je suis également maman d’un enfant vivant avec DID depuis 2017.
Je suis diabétique depuis l’âge de 15 ans et, à l’époque, mon obsession était de pouvoir exercer le métier dont je rêvais, infirmière, tout en vivant avec une maladie chronique.
Une fois ce défi relevé, j’ai eu envie de devenir maman.
Avec le diabète, rien n’a été vraiment simple mais, désireux·ses d’accueillir un enfant, nous nous sommes accroché·e·s.
J’ai consulté mon diabétologue avant d’arrêter la contraception. Il m’a été demandé de maintenir mon diabète équilibré le plus possible et j’ai bénéficié d’un suivi rapproché du bébé pendant toute ma grossesse.
A aucun moment de ma grossesse n’a été évoqué la possibilité de transmettre mon DT1 à mon enfant.
Le diagnostic, le jour où notre vie a basculé
Ma fille a déclaré son diabète à l’âge de 10 ans, le 12 août 2017 très exactement.
Ce jour, je ne saurai l’oublier car, à ce moment-là, mon monde s’écroule. Je suis envahie d’un tel sentiment de culpabilité, je suis abasourdie, sous le choc, révoltée contre tout et tout le monde. Je me sens terriblement coupable d’avoir transmis cette maladie chronique, insidieuse, et difficile à gérer au quotidien à mon enfant.
Un tas de questions tournent en boucle dans ma tête. Comment ai-je pu transmettre mon diabète de type 1 à ma fille ? Est-ce héréditaire ? S’il y avait un risque, pourquoi ne l’a-t-on pas dit ? Comment ma petite fille va-t-elle réussir à vivre avec ce DT1 je croyais être seule à devoir surmonter ?
Pour aller plus loin : Quelle est l’origine du diabète de type 1 ?
Le chemin vers l’acceptation de la maladie
Je dirai que l’acception de la maladie chronique se vit presque comme un deuil. On passe par plusieurs étapes, diverses phases, émotionnellement parlant notamment.
Après la colère et le désarroi, se sont installés le soutien, l’accompagnement et l’entraide.
Dans sa chambre d’hôpital, Lucie vient d’apprendre qu’elle va vivre avec un diabète de type 1, comme sa maman.
Mon diabète n’a jamais été un sujet tabou à la maison, pour autant je ne l’exposais pas nécessairement. J’avais appris Lucie à reconnaître les signes d’hypoglycémies, notamment pour qu’elle puisse m’aider à me resucrer en cas d’hypo sévère. Elle savait donc de quoi il s’agissait.
Malgré la peine et toutes les émotions qui m’envahissent, mon rôle de maman était d’être là pour elle et de l’aider à surmonter cette épreuve.
Qui mieux que moi, sa maman qui vit aussi avec un diabète de type 1, était la mieux placée pour savoir que ça n’allait pas être facile tous les jours ? Car oui, c’est le quotidien de la vie avec une maladie chronique qui ne nous quitte jamais !
Mais, plutôt que de m’apitoyer sur notre sort, j’ai eu à cœur de lui démontrer qu’il est possible de vivre presque normalement quand on vit avec un diabète.
Ma fille m’a toujours vu faire ce que je voulais sans contraintes, j’espérais que du haut de ses 10 ans cela la rassurerait et lui donnerait espoir.
Mon rôle était de préserver cet optimisme car, à ce moment précis, nous ne sommes qu’au début !
Pour aller plus loin : Diabète chez l’enfant : apprentissage de l’autonomie
Le diabète, ce lien si spécial qui nous a encore plus rapproché
Nous étions en vacances, nous nous sommes retrouvées dans un hôpital que je ne connaissais pas à 700 kms de chez nous. Un nouveau diabète dans la famille, pas de repères autour de nous… Cela commençait à faire beaucoup. J’ai pris l’éducation thérapeutique et la prise en charge de ma fille à bras le corps.
Au début, je lui faisais ses glycémies capillaires et, pour ses premières injections, je l’autorisais à me piquer en sous cutanée. Elle faisait mes bolus aux stylos alors qu’à la base je suis sous pompe à insuline. Je voulais qu’elle apprenne le geste, qu’elle le répète pour qu’elle puisse se l’appliquer.
Ces moments assez uniques que nous partagions, dont seules nous deux connaissions la réalité, ont contribué à instaurer une relation particulière entre nous, plus intime, plus fusionnelle dont la pierre angulaire était l’échange d’expérience, l’entraide et le réconfort.
Maman ou infirmière, comment se positionner ?
A mesure du temps, ma place de maman changeait et j’avais tendance à me positionner plutôt en infirmière spécialisée. C’était pour moi un moyen de maîtriser toutes les failles. Mais finalement, sans m’en apercevoir, nos échanges ne tournaient qu’autour de son diabète : hypo, hyper, insuline… J’en oubliais parfois même mon propre diabète.
Deux ans après le diagnostic de Lucie, lors d’une consultation avec le diabétologue dans notre centre hospitalier d’origine, ce dernier m’a alerté en me conseillant de rester à ma place de maman et de laisser une autre personne, extérieure, endosser le rôle de l’infirmière.
Avec du recul, il a vu juste. En étant à la fois maman et diabétique, cela me permet de lui apporter mon expérience, d’être plus compréhensive lors des coups de mou. Quand son diabète devient une contrainte et qu’elle n’arrive plus à le maîtriser, je la comprends mieux que personne et l’accompagne en ce sens.
Mais, à la fois, j’aimerai pouvoir tout contrôler, je suis inquiète, j’ai peur que tout ne se passe pas toujours bien… Sans forcément le faire consciemment, cela me conduit à exercer une forme de pression, à vouloir contrôler ses choix, à être très présente, parfois même envahissante.
J’ai moi aussi dû faire un travail sur moi-même et un cheminement qui m’ont amené à réaliser que mon rôle de maman c’est aussi de lui laisser un peu d’autonomie avec son diabète (tout en gardant un œil, d’un peu plus loin).
Rire et se divertir, une thérapie ?
Pour qu’il soit plus facile à vivre, nous avons décidé de prendre le diabète du bon côté.
Nous nous lançons des défis qui nous font sourire, comme le challenge de la meilleure moyenne glycémique hebdomadaire, l’objectif licorne (glycémie à 1g) ou encore le fait de changer nos pompes en même temps avec un chrono (non vous n’avez pas rêvé, nous portons toutes les deux une pompe à insuline maintenant).
Ces moments permettent de dédramatiser la vie avec le diabète et de favoriser le partage, ce sont NOS moments !
Le plus amusant reste la prise de risque quand on se laisse aller à quelques plaisirs gourmands : glace, gaufre, crêpe, laquelle de nous deux conservera la meilleure glycémie ?
C’est aussi, je l’avoue, une façon de garder un œil sur ce qu’elle fait, qu’elle ne se sente pas seule dans la bataille et de contribuer à l’autonomiser (bon ok, ça me rassure 😅).
Aujourd’hui, ma fille Lucie a 15 ans (5 ans de DT1). Nous sommes passées par des phases difficiles voire critiques, avec déni de la maladie notamment, classique à l’adolescence. Mais, je n’ai pas lâché, je l’ai toujours soutenu, compris et suivi.
Pour aller plus loin : Comment vit-on avec un diabète de type 1 à l’adolescence ?
Ce sentiment de culpabilité de lui avoir transmis le diabète ne me quittera pour ainsi dire jamais, mais, je suis fière de la façon dont elle se prend en charge, de l’autonomie qu’elle a acquis et de sa maturité dans ses prises de décision.